Contribution au débat sur l’énergie en général, et l’éolienne en particulier

 

La France est quasi totalement dépendante de l’étranger pour son énergie. Au moment où le gouvernement français s’apprête à mettre 10 milliards d’euros à la disposition des entreprises spécialisées dans l’énergie électrique obtenue par voie éolienne, au moment où l’éternel « buzz » des pseudo-écologistes va s’accentuer à la veille d’élections, un pointage de la situation nationale s’avère intéressant pour nos citoyens accompagné de quelques informations simples. Rappelons que le « Grenelle de l’environnement » a prévu que notre pays doit passer de 10 % en énergies renouvelables (ENR) à 23 % d’ici 2020.

1. Sur l’origine de la production d’électricité fin 2010
(source : Réseau de transport d’électricité – RTE)

La production française d’électricité s’élève à 550,3 TWh1pour près de 65 millions d’habitants.
a. L’électricité obtenue par les énergies renouvelables se déclinant ainsi :
– photovoltaïque : 0,6 TWh ; croissance 2010/2009 : + 281,6 %
– éolien : 9,6 TWh ; croissance 2010/2009 : + 22,2 %
– autres (dont biomasse) : 4,8 TWh ; croissance 2010/2009 : + 11,1 %
– hydrauliques : 68,0 TWh ; croissance mondiale : + 9,9 %
– total production ENR de 83,0 TWh

b. L’électricité obtenue par l’énergie dite thermique-combustibles (TC = charbon, gaz, fuel):
– total en TC : 59,4 TWh soit + 8,3 % en un an

c. L’électricité obtenue par l’énergie nucléaire :
– total : 407,9 TWh soit + 4,6 % en un an

Ainsi, chose connue, la part du nucléaire dans la production nationale d’électricité reste très importante et représente donc : 407,9 Twh / 550,9 Twh = 74 % de l’électricité.

2. L’électricité obtenue par effet photovoltaïque en France

On parle parfois de « KW crête », c’est-à-dire de « puissance crête ». Elle caractérise la puissance d’un panneau dans des conditions d’ensoleillement optimales. 1 KW crête (1 KWc) produit approximativement 1000 KWh par an. La capacité de production d’électricité photovoltaïque en France est en 2009 de 200 MWh (mégawattheure) ; en 2010 de 760 MWh.
Mais alors que le prix des panneaux photovoltaïques a été divisé par trois, car produits en Chine, le gouvernement a suspendu en décembre l’obligation de rachat par EDF de l’électricité produite par effet photovoltaïque pour des nouvelles installations de plus de 3 KW. D’après la société Emrenn, une installation de 3 KWc correspond à 30 m² intégrés dans le bâti. Le KWh est alors vendu à EDF à 58 cts d’euros HT (contre 8,17 cts d’euros/KWh hors taxe normalement) pour un coût d’installation de 18 000 € TTC hors crédit d’impôt. Si le coût d’achat du KWh est maintenu garanti sur 20 ans, le revenu attendu sera de 1 800 € par an, ce qui donnerait un excellent rendement. Mais le coût pour notre gouvernement a atteint 1,6 milliard d’euros (voir ci-dessous). En conséquence il a décidé un moratoire jusqu’au 9 mars d’où le dépôt de bilan de certaines petites sociétés qui s’étaient lancées dans l’aventure. Mais aussi les importations d’équipements photovoltaïques qui ont « planté » la balance commerciale de notre pays d’1,5 milliard d’euros en 2010 (déclaration de Nathalie Kosciusko-Morizet) illustrant ainsi notre retard technologique dans ce secteur.

3. A propos de l’énergie éolienne en France

a. Rappels. La notion du facteur de charge, appelé aussi facteur de puissance, indique la proportion de temps où la centrale tourne. Dans une centrale éolienne offshore ce facteur est entre 25 % à 30 % alors qu’il est de 90 % pour une centrale nucléaire. En conséquence, lorsque les médias disent que notre gouvernement s’apprête à aider les entreprises dans l’éolien à hauteur de 600 turbines de 5 MW chacune d’ici 2015 il est faux de dire que : 600 x 5 MW = 3000 MW = 3 GW (gigawatt) approximativement la puissance obtenue par 2 réacteurs nucléaires de 1600 MW (1,6 GW) chacun.
La réalité est, en prenant le facteur de charge le plus élevé dans l’offshore : 30 % x 600 turbines x 5 MW = 900 MW. Pour une centrale nucléaire : 90 % x 1,6 GW = 1,44 GW= 1440 MW, soit 900 MW pour 600 turbines éoliennes divisés par 1440 MW pour une centrale nucléaire = 62,3 % d’une centrale nucléaire pour 600 turbines éoliennes. Ou bien : 30 % x 5 MW = 1,5 MW pour obtenir l’équivalent de 2 x 1440 MW = 2880 MW. Il faut donc 2880/1,5 = 1920 éoliennes et non 600 pour l’équivalent énergétique de 2 centrales nucléaires.
Ajoutons qu’en plus il faut injecter cette énergie éolienne au fur et à mesure de sa production dans un réseau existant car on ne sait pas la stocker à un prix intéressant
b. La situation actuelle et future. En 2010 il y a en France 3550 éoliennes pour une puissance installée de 5,6 GW et une électricité produite de 8,6 TWh. A comparer avec 63,13 GW dans le nucléaire et 24,178 GW dans l’hydraulique.
Les aides publiques d’un montant de 10 milliards d’euros vont concerner quelques 200 entreprises et principalement EDF qui s’associerait à Alstom pour les turbines et GDF/Suez.
Cette dernière estime que le projet de parc éolien situé à 14 km au large du Tréport et du Hourdel comptera 140 éoliennes de 5 MW chacune et générera 140 x 5 = 700 MW de puissance totale (sic : voir la remarque ci-dessus). Ce parc produira 2,16 TWh chaque année et l’investissement sera de 1,8 milliards d’euros.
D’après une étude de l’institut d’études économiques COE Rexecode l’objectif de « la production d’électricité éolienne fixée par le Grenelle de l’environnement, soit 59 TWh à l’horizon 2020 nécessiterait un investissement de 36 milliards d’euros. »

4. Définition de la cogénération

Processus de production simultanée d’électricité et de chaleur à partir de produits pétroliers, gaz naturel, déchets, charbon ou biomasse. Le principe est d’éviter la perte de la chaleur créée lors de la production d’électricité en transformant cette chaleur elle-même en électricité ou bien en l’utilisant directement dans des réseaux de chauffage. Parce qu’elle optimise la production d’énergie et réduit les effets de celle-ci sur la planète, la cogénération est considérée comme une technique d’avenir.

5. Sur la comparaison des prix

Rappel. Au moment de la privatisation annoncée de l’électricité, la France se dote en 2000 d’une Commission de régulation de l’électricité (CRE) chargée de veiller au bon fonctionnement des marchés de l’électricité et du gaz naturel, au respect de la concurrence. Au sein de cette commission est créé le poste de Médiateur national de l’énergie. Cette commission comprend deux instances : le Collège de la Commission formée de 9 membres dont le président est nommé par le Président de la République, 2 membres du Sénat, 2 de l’Assemblée nationale, 1 du CES, 2 représentants des consommateurs (un pour le gaz, un pour l’électricité), etc. Et un Comité de règlement des différents et des sanctions formé de 4 membres : 2 conseillers d’Etat et 2 de la Cour de Cassation, le président est nommé par décret.
La CRE se dote en janvier 2003 d’un outil de financement du marché libéralisé de l’électricité appelé Contribution aux charges de service public de l’électricité (CSPE ou « contribution unitaire »). Cette CSPE est due par tous les consommateurs finals d’électricité en France en fonction des KWh consommés. Cette contribution a comme but d’assurer les surcoûts des politiques de soutien à la cogénération et aux énergies renouvelables, d’assurer les surcoûts de l’électricité dans les zones non interconnectées au réseau hexagonal : les îles bretonnes, Corse, etc ; d’assurer les pertes de recettes dues à la tarification spéciale des personnes, par exemple les personnes en situation de précarité, d’assurer le surcoût dû à l’octroi d’un Tarif réglementé transitoire d’ajustement de marché (TarTAM), principalement aux entreprises. La CSPE accorde des dérogations aux entreprises sous forme de plafonnement et d’exonérations.
Par exemple, le surcoût du KWh obtenu par l’énergie éolienne et acheté par EDF est répercuté sur la facture d’électricité de chaque consommateur.

La CSPE est fixée par la CRE. En 10 ans, nous avons connu au moins 6 lois et des dizaines de décrets et d’arrêtés précisant les modalités de calcul de la CSPE, de sa gestion par la CDC, et de sa distribution auprès des collecteurs de ces énergies que sont EDF, les Distributeurs Non Nationalisés (DNN), et l’Electricité de Mayotte.
En 2009, la CSPE était fixée à 4,5 €/MWh (€/MWH étant l’unité de calcul choisie). Quelque 2,4 milliards d’euros ont ainsi été prélevés sur les citoyens.

Prix de l’électricité achetée par EDF en centimes d’euros par KWh soit « c€/KWh »

Origine de l’énergie Prix en c€/KWh
éolienne terrestre 8,2 pendant 10 ans, puis entre 2,8 et 8,2 pendant 5 ans selon la productivité du parc
éolienne offshore 13 pendant 10 ans, puis de 3 à 13 pendant 10 ans suivant la productivité du parc
photovoltaïque Compris entre 31,4 et 58 c€/KWh
géothermie 12 à 15
hydraulique 6,07 à 10,25
biogaz,méthanisation 7,5 à 14 c€/KW

(Source : Compagnie du Vent)

Dans le rapport récent du cabinet COE REXECODE, il est signalé que pour atteindre l’objectif du Grenelle de l’Environnement pour 2020 de produire 59 TWh (36 milliards d’euros d’investissement) les coûts de production de l’électricité éolienne seraient :
– éolien terrestre : 6,3 c€/KWh
– éolien offshore : 10,3 c€/KWh
– pour un prix d’achat de gros de l’électricité de 8,5 c€/KWh
(source : Compagnie du Vent, GDF/SUEZ)

Mais il nous a semblé intéressant d’adresser aux militants la délibération de la CRE pour déterminer le montant de la CSPE 2011 afin qu’ils puissent critiquer si nécessaire nos conclusions (consultez le document).

Conclusion

On rappellera d’abord que la libéralisation du prix de l’électricité devait faire baisser le prix payé par le consommateur et c’est tout le contraire qui s’est produit et non dans des petites proportions.
Une fois de plus c’est par l’injection massive d’argent public auprès des entreprises privées que l’on cherche à rentrer dans les ENR, sans aucune prise de participation de l’Etat.
La ribambelle de lois, de décrets, d’arrêtés votés ces dix dernières années relatives à l’énergie, ne sert qu’à « saucissonner » et « enfumer » les citoyens. Ne faut-il pas se poser la question de l’honnêteté de la mise en place d’un tel système et des affairistes qui en profitent ?

Puisque, en fin de compte, ce sont EDF/VEOLIA, ALSTOM (turbines et distribution) ou GDF/SUEZ, ou AREVA (c’est-à-dire toutes des anciennes entreprises publiques) qui vont répondre principalement aux appels d’offres s’appuyant sur des petites PME/PMI pour la sous-traitance, il est logique que nous proposions la création d’un pôle public de l’énergie s’appuyant sur les sociétés d’énergie citées ci-dessus (EDF, AREVA, GDF, Total, etc.) mais socialisées afin de contrôler le prix de l’énergie et faire baisser les coûts de R&D. Ce pôle se doterait d’un centre d’innovation pratique dans les ENR – type les anciens CNET et CCETT pour les télécommunications ou type les Fraunhoffers allemands – se consacrant à l’innovation, c’est-à-dire à la conception, mise au point de prototypes et de certains process industriels. Ce centre s’appuierait sur des laboratoires de recherche fondamentale et sous-traiterait aux PME/PMI des éléments des objets finaux à réaliser.

  1. TWh = 1 térawatt/heure = 1 milliard de kilowatt/heure
    Attention à ne pas confondre « puissance » (ici en watt) et « énergie » (ici en wattheure). []

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