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Dans son ouvrage, qui a fait date, Le triomphe des Lumières, le professeur de l’université d’Harvard, Steven Pinker démontre chiffres à l’appui que jamais l’humanité n’a vécu une période aussi paisible et heureuse. Son livre illustre que la santé, la prospérité, la sécurité et la paix sont en hausse dans le monde entier. Ce progrès est un legs du siècle des Lumières, animé par des idéaux puissants : la raison, la science et l’humanisme.
C’est peut-être le plus grand succès de l’histoire de l’humanité.
Même si les forces obscures étaient encore fortes et génératrices de malheurs bien profond, le XXe siècle avait été celui d’un Nietzsche débarrassant les hommes de la dictature des arrières-mondes (Dieu est mort) pour laisser libre-cours à leur volonté de vie. Les progrès constants de la science font en effet reculer les risques de mort et permettent enfin le grand « oui » d’Aristippe de Cyrène à la vie.
Pourtant, en ces premières années du siècle suivant, une sinistrose semble se répandre en remettant en cause les valeurs des Lumières et en redonnant corps aux tendances humaines, au tribalisme, à l’autoritarisme et à la pensée magique qui sont autant de biais qui nourrissent les populismes et les dérives religieuses. Il ne se passe pas un jour sans que nous soyons informés que la peur du progrès et le doute aient produit un effet pernicieux sur des hommes et des femmes.
Au mois de décembre 2019, il aura par exemple suffi d’une seule personne – ade pte des thèses anti-vaccinations – pour décimer 60 personnes et en rendre malade de la rougeole plus de 4000 autres dans les îles Samoa. Cette même rougeole qui était une maladie où l’incidence en France était devenue inférieure à 0,1 cas pour cent mille habitants en 2006 qui fait son retour en force favorisée selon la terminologie officielle par des « communautés d’enfants et d’adolescents incomplètement ou non vaccinés ». Les foyers d’infections sont très nombreux autour des écoles privées Steiner-Waldof qui respectent les dogmes de la nouvelle religion anthroposophe.
La bientôt morte Milviludes (Mission Interministérielle de vigilance et de luttes contre les dérives sectaires) suivait la « galaxie anthroposophique » qui ne théorise pas uniquement l’abandon de la vaccination dans ses écoles puisqu’elle développe aussi, une « médecine » spécifique dont les protocoles thérapeutiques ne suivent pas la voie académique officielle, un mode d’agriculture appuyé sur l’astrologie et la pratique magique ainsi qu’un organisme financier qui lui est propre.
C’est une communauté spirituelle à part qui se constitue, dont les pratiques ésotériques mettent finalement en danger l’ensemble de la société.
Les professeurs de l’Éducation nationale doivent aussi faire face à la remise en cause de l’enseignement scientifique. Les dogmes et les certitudes entendus dans les familles, les lieux de cultes, catéchismes ou autres écoles religieuses ainsi que les vastes agoras éclectiques du Net qui rentrent dans l’école laïque. Comment de telles menées irrationnelles peuvent-elles avoir autant d’impact ? Pourquoi les enseignements de la science utilisés dans l’intérêt général sont-ils rejetés par un nombre inquiétant de citoyens et de familles ?
Le néolibéralisme a récréé dieu puisque cette pensée massifiante fonctionne comme une religion avec ses vérités révélées comme cette fameuse main cachée imaginaire censée réguler l’économie. Les dogmes néolibéraux ont reconstruit un arrière-monde avec son paradis du ruissellement pour tous et son enfer réel de la relégation et de l’insécurité sociale. Les sectes et leur pratiques rétrogrades sont l’habillage de ce grand retour néolibéral à une société d’avant les Lumières. La période ne manque pas de Cassandre pour s’en réjouir et pour annoncer la fin de la modernité. Ces postmodernes fournissent des explications intellectuelles à la révolution rétrograde des obscurantismes unis où les hommes éclatés en tribus n’ont plus de volonté de puissance d’être libres.
Face à eux se trouve toujours le camp du progrès mélioriste armé de convictions laïques et éclairé, comme nous le rappelait, la philosophe Catherine Kintzler de « raison laïque ». La raison laïque utilise l’athéisme méthodologique pour une coéducation permanente des enfants et des citoyens par l’école, l’éducation populaire et les familles. Cela favorise l’élaboration d’une vie commune qui laisse les convictions religieuses dans l’intimité (en les respectant) afin de construire des individus à la conscience libre car libérée des dogmes confessionnels, patronaux, économiques ou familiaux.
C’est la raison laïque retrouvée, émancipatrice et créatrice de liberté qui permet de résister au déclinisme et au refuge trompeur dans les cosmogonies tribales porteuses de pratiques magiques irrationnelles et dangereuses. Sans raison laïque, la sortie du néolibéralisme ne reste qu’une hypothèse. L’union est un combat rationaliste, laïque et social mené par l’UFAL.

Nicolas Pomiès

Rédacteur en Chef

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