Du 3 au 6 février s’est tenu à Dakar le 4e Forum social mondial de
 la santé et de la sécurité sociale. Cette initiative a eu lieu deux
 mois après la 1ère Conférence mondiale pour le développement des 
systèmes universels de sécurité sociale de Brasilia.

Dans la plupart des pays du monde, sauf une dizaine, le recul des droits à une prévention et un accès aux soins de haut niveau partout et pour tous est manifeste. Tous les pays européens et africains sont concernés par ce recul.

Plusieurs décisions ont été prises :

•     Promotion des principes d’universalité et de solidarité pour les
 systèmes de santé et de protection sociale de haut niveau, partout et
 pour tous. Bernard Teper (UFAL) a proposé que les politiques ciblées – dont on peut comprendre l’urgence ici et là – se fassent dans le respect des principes précédents et abandonnent le ciblage charitable sans solidarité ni universalité.

•     Création d’un laboratoire politique permettant : d’une part de mieux définir les mots utilisés (santé, sécurité sociale, protection sociale,
sphère de constitution des libertés, égalité, équité) et les discours,
car force est de constater que les militants du monde entier utilisent les mêmes locutions avec des contenus différents ; et d’autre part de
définir les pistes possibles pays par pays pour aller vers
l’universalité de haut niveau de la protection sociale partout et pour
tous. Ces pistes devront bien sûr tenir compte de tous les paramètres (démographie médicale et paramédicale, structures de santé de
proximité et structures de santé d’excellence, financement,
déterminants sociaux et environnementaux de la santé, etc.)

•     Avant de lancer la 2e Conférence mondiale de 2013, faire des forums
nationaux et régionaux de santé,  Armando de Negri a proposé une
conférence régionale andine acceptée avec enthousiasme par les
sud-américains présents, notamment colombiens et brésiliens.
Bernard Teper, au nom de l’UFAL, a proposé d’expérimenter un forum sur
une région Nord-Sud francophone : France, Belgique, les 4 pays du Maghreb et les pays francophones de la CEDEAO et de l’Afrique de l’OUEST. Cette proposition a suscité
de l’intérêt chez tous les pays africains présents, et notamment dans
la délégation marocaine formé de syndicalistes, de féministes et d’une
association pour le droit à la santé, ainsi que chez les Sénégalais et
Guinéens présents, dont de nombreux jeunes « boostés » par l’exemple
tunisien et égyptien.

•     Un conseil international devrait pouvoir être enfin créé pour
mutualiser les expériences, les débats et les prises de décision. En marge des séances plénières, des discussions ont eu lieu sur la
faisabilité de réunions publiques, stages de formation et cycles
d’universités populaires dans les pays africains. Des contacts ont été
pris pour en étudier la possibilité.

Près d’une centaine de participants et de délégués ont alimenté ce forum qui intervient à un moment où :

– Les politiques néolibérales obligent de plus en plus de travailleurs à rejoindre le secteur informel de l’économie1. Ce qui met en difficulté les prélèvements sociaux tant par l’impôt, que basés sur la cotisation sociale. Cette dernière ne pouvant relever que du secteur formel. Cela est très dommageable car c’est bien la protection sociale financé par la cotisation sociale qui résiste le mieux aux crises économiques (à condition d’une extension du secteur formel de l’économie) et aux tentatives de fuites à l’étranger du profit des entreprises par une répartition des richesses au moment de leur création.

– Les systèmes de plafonnement des cotisations et de baisse des impôts font que les couches populaires du secteur formel financent plus la Sécu que les couches aisées contrairement au principe de la solidarité.

– Le financement par l’impôt et par les cotisations sociales restant insuffisant, beaucoup mettent l’accent sur les taxes internationales. Sans nier l’intérêt des taxes internationales, il convient de dénoncer l’illusion que celles-ci, pourraient remplacer les financements par l’impôt et les cotisations sociales.

Le problème, avec le turbocapitalisme, c’est que l’aide ne représente que 17 % des budgets des pays en difficulté et est toujours assortie de contreparties anti sociales
 (plans d’ajustements structurels imposés par les organisations 
multilatérales qui font partie de la gouvernance mondiale) et que le rapport des 
forces est tel que le produit éventuel de ces taxes, au lieu d’aller à la protection
 sociale, pourrait tout à fait être utilisé pour aider les
 spéculateurs en faillite comme en 2008-2009.

En analysant la participation à ce 4e FSMS, on peut estimer 
néanmoins que le nombre de pays présents était insuffisant et qu’un
 gros travail doit être fait pour élargir la participation au FSMS des 
mouvements sociaux d’un nombre croissant de pays. Si les 
chercheurs liés aux mouvements sociaux ont toute leur place dans le 
FSMS, ils ne sauraient remplacer les syndicats et les associations de 
lutte de ces pays.
 Quant à la tonalité de ce 4e FSMS, où différents courants étaient
 représentés, la gauche anti-libérale semblait majoritaire 
alors qu’une minorité semblait penser que l’on peut
 compter sur les institutions et gouvernements existants.

En conclusion : ce 4e FSMS possède de belles potentialités mais sous réserve
 d’un immense  travail à effectuer. Sera-t-il capable de tenir la gageure ?

  1. La notion de secteur informel (ou « secteur non structuré ») est définie par l’Organisation internationale du travail (OIT). Ces activités échappent à tout type d’imposition, de contrôle ou même simplement de dénombrement. Elles vivent en marge de la production classique de biens et de services et échappent à toute réglementation. Elle est un complément indispensable aux politiques néolibérales et ce sont les politiques néolibérales qui favorisent son extension et utilisent des personnes peu qualifiées. []

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