Depuis toujours, l’emploi est le parent pauvre de la politique. Celui qu’on loge dans la chambre de bonne, et à qui on fait prendre l’escalier de service. Tant son costume élimé ne fait pas chic, dans les salons où on cause, entre personnes convenables. C’est vrai pour tous les gouvernements, puisque les crédits pour l’emploi sont toujours les premiers sacrifiés. C’est vrai aussi pour les partis de gauche : et si les questions emploi sont à ce point ignorées, taboues, rejetées d’un revers de la main, ce sont, à travers elles, les classes populaires que l’on méprise, et donc les problèmes qui les touchent !

Le chômage actuel, le pire jamais constaté au cours de ces 35 dernières années ! Or, l’ultra-libéralisme de Sarkozy jette tous les jours sur le carreau, des tombereaux entiers de salariés promis à la mort sociale. N’en déplaise au silence des médias officiels, les chiffres actuels du chômage sont les pires jamais comptabilisés au cours de ces 35 dernières années : pires que lors du premier choc pétrolier de 1975. Pires surtout que lors de la récession économique de 1993, puisqu’on enregistrait 30 000 nouveaux demandeurs d’emploi chaque mois, contre 60 000 ou 90 000 aujourd’hui, soit deux à trois fois plus ! Le chiffre du chômage du mois d’octobre faisait état de 53 500 nouveaux demandeurs d’emploi. Mais il s’agit des seuls chômeurs inscrits en catégorie 1. Or, ce chiffre n’inclut pas les salariés licenciés mis d’office dans une convention personnalisée de reclassement (CPR), ce qui évite de les comptabiliser au titre des nouveaux chômeurs. Sans parler encore des 10 000 dossiers d’inscription au chômage non traités dans les pôles emploi. Surtout, la publication du chiffre mensuel du chômage le 24 ou le 25 du mois, alors qu’il était connu jusque là le 30 ou le 31 : ce qui permet au gouvernement de gagner une semaine, et de diminuer le nombre de chômeurs de 25 % ! Il y avait le soldat inconnu ; grâce à Sarkozy, il existe désormais le chômeur inconnu, celui à qui n’a même pas l’insigne honneur d’être comptabilisé dans une statistique mensuelle ! Au total, ce n’est donc pas 53 500 nouveaux demandeurs d’emploi auquel on parvient pour le mois d’octobre, mais 90 000 facile ! Bien plus, se développent de plus en plus des marchés de la misère : par exemple, Porte de Vanves ou Porte de Montreuil, des gens, qui n’ont plus rien, vendent à même le sol de vieux vêtements, des médicaments et de la nourriture périmée un euro ou un euro cinquante. Tout cela, dans la plus parfaite indifférence actuelle de tous les partis politiques, y compris ceux qui sont officiellement positionnés à gauche.

On pense aussi qu’un gouvernement, qui fait le choix de la tricherie et du mensonge, pour ne pas prendre ses responsabilités en matière d’emploi, est digne d’un régime à la Ceaucescu ! On entrevoit surtout comment la domination libérale repose autant sur la confiscation des médias officiels, que sur l’occupation du pouvoir légitime. A partir de là, dénoncer sans nuance le bourrage de crâne actuel sur les chiffres du chômage n’a rien d’une démarche moralisatrice à la petite semaine, fondée sur le seul principe que ce n’est pas bien de mentir ! Il faut absolument briser le silence qui entoure le nombre véritable de chômeurs en France : c’est s’attaquer aux fondements même du libéralisme, et pas seulement à ses manifestations. Car, dans le domaine de l’emploi, cela revient à pointer ce qui rend possible et que perdure le scandale du chômage actuel d’une ampleur inouïe. Voilà pourquoi, il incombe, de toute urgence de ne pas tomber dans cet océan d’indifférence et de banalisation, qui accompagne aujourd’hui la publication mensuelle des chiffres du chômage. L’emploi est de très loin la question politique la plus importante du moment. Et ce, jusqu’en 2012. Comme l’explique Bruno Cautres dans l’Humanité-Dimanche du 28 mai 2009, la question du chômage sera au cœur de la prochaine campagne présidentielle. La dernière enquête sur le sujet montrait de 59 % des Français font de l’emploi leur préoccupation numéro un, soit 13 points de plus en un an !

De véritables propositions en matière d’emploi. En premier lieu, il importe d’apporter une réponse concrète aux magouilles sans nom qu’inventent aujourd’hui les patrons, afin de justifier leurs plans sociaux : donner des commandes à une autre entreprise, afin d’en fermer une autre. Établir une production parallèle. Laisser vieillir les équipements de l’usine condamnée à la fermeture. Mettre un site en liquidation judiciaire, afin de faire payer par la collectivité les salaires des ouvriers licenciés et le plan social… Ces pratiques sont la conséquence directe d’employeurs qui se sentent tout puissants, et qui peuvent faire ce que bon on leur semble. Voilà pourquoi, on propose absolument de rétablir l’autorisation administrative de licenciement. Redonner à l’inspecteur du travail le pouvoir légal de contrôler la réalité et la sincérité du motif économique invoqué par l’employeur. Ce contrôle administratif permettra de diminuer, de façon substantielle le nombre de licenciements économiques. Et de faire un véritable ménage entre les plans sociaux justifiés par de véritables difficultés économiques, et les plans sociaux de complaisance, qui se développent aujourd’hui. Parce que l’employeur a tous les pouvoirs, y compris celui de mettre des salariés à la porte, au nom de la tricherie et du mensonge. Le pouvoir de contrôle de l’inspecteur du travail doit pouvoir être relayé par un droit de véto suspensif donné au comité d’entreprise, saisi d’un plan de licenciement. Le comité d’entreprise doit pouvoir faire obstacle au pouvoir de l’employeur. En particulier, il vérifiera la réalité du motif économique invoqué à l’appui d’une procédure de licenciement. Il disposera d’un pouvoir suspensif. L’inspecteur du travail arrêtera la décision définitive. Cette proposition constitue une véritable révolution dans l’organisation du pouvoir au sein d’une entreprise. Par ailleurs, il est navrant de voir tous les jours des syndicalistes CGT se battre pour une prime de départ. Tant ils ont renoncé eux même, à lutter pour le maintien des salariés dans l’entreprise. Acceptant ainsi implicitement la politique libérale « d’accompagnement du salarié licencié », terme repris tout à la fois par C. Lagarde et Aubry. Or, qu’est-ce que la convention personnalisée de reclassement proposée aujourd’hui à chaque salarié licencié ? Sinon, le versement de 70 % du salaire antérieur pendant douze mois, c’est-à-dire une somme d’argent destinée à faire sortir le salarié du monde du travail. Et l’immense avantage de ce dispositif est que les salariés licenciés ne sont pas comptabilisés pendant un an parmi les chômeurs. Ainsi, les salariés de La Célanèse ne figurent pas aujourd’hui sur les listes du Pôle emploi, puisqu’on les a tous mis en convention personnalisée de reclassement ! Voilà pourquoi, et afin de lutter contre la résignation syndicale, face à la fermeture d’un site, il importe de demander la création d’une obligation légale et individuelle de reclassement faite à chaque salarié licencié, à salaire et qualifications égales, dans un rayon maximum de 2 00 kilomètres. Enfin, on préconise, pour les jeunes comme pour les adultes enkystés dans le chômage une politique ambitieuse de création d’emplois subventionnés par l’État dans les mairies et les associations, sur le modèle des emplois jeunes et des contrats emploi consolidés créés entre 1997 et 2000, pendant la période réformatrice du gouvernement Jospin. Dans tous les cas, il s’agira de contrats de travail d’une durée de 5 ans, respectueux du code du travail, car disposant de tous les droits et avantages sociaux afférents au contrat de travail de droit commun. Rémunérés sur la base minimale du SMIC, et offrant des taux de retour à l’emploi de l’ordre de 60/65 %. Ces mesures seraient associées naturellement à un véritable plan de relance économique, qui représente au moins 5 % du PIB, seul de nature à créer des emplois dans le public (écoles, hôpitaux, justice…) et dans le privé, (visant tout à la fois les grandes entreprises et les PME) : c’est cela une vraie politique de gauche !

Briser l’incroyable silence actuel sur les chiffres du chômage, faire prendre conscience aux gens de sa gravité extrême, est la priorité du moment. Et faire, tout à la fois, de solides contrepropositions en la matière. Toutes nos initiatives, tous nos efforts doivent vers ce but : tout miser sur l’emploi, l’emploi, l’emploi !

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