Représentant entre 25 % et 40 % du budget d’une famille, aujourd’hui le logement est le souci de millions de familles qui sont mal logées ou qui rencontrent des difficultés à trouver un logement par rapport à leur revenu.

La crise du logement que nous vivons depuis plusieurs années, s’est accentuée avec la crise de 2008. L’absence de politique pour loger les classes populaires et moyennes se reflète dans ce constat alarmant : il manque 1 200 000 logements pour résoudre la crise. Pour répondre à la demande courante (déménagement, nouveaux couples, séparations, nouvelles installations, etc.) il faut construire 350 000 logements par an, et pour résoudre les demandes non satisfaites il faudrait construire 500 000 logements par an pendant 5 ans, nous en sommes loin aujourd’hui.
Comment résoudre la difficulté à se loger ? Où trouver les financements ? Comment développer le logement social ? Comment conforter le mouvement HLM et répondre aux demandes de nos concitoyens ? Le secteur logement de l’UFAL se veut une force de propositions sur ces questions.

Depuis la fin du 19e siècle et l’industrialisation, le logement social a toujours été au centre des préoccupations politiques. De la gauche à la droite républicaine, chacun avait conscience que l’on ne pouvait laisser le logement à la discrétion du marché. De la loi Siegfried en 1894 qui institue les Habitations à bon marché, ancêtres des HLM, qui avec la loi Loucheur en 1928 va stabiliser la notion de logement social. C’est l’engagement de l’État aux côtés des municipalités qui permet par l’obtention de prêts à taux réduit et de subventions de construire des logements adaptés à la population ouvrière.
L’initiative privée qui a toujours existé venant du patronat, de la cité Mame à Tours pour loger les ouvriers de l’imprimerie aux corons du Nord, le patronat avait conscience qu’il fallait loger dignement ses salariés.

En 1950, les HBM deviennent les HLM (Habitation à loyer modéré) et pendant 10 ans, de 1965 à 1975, l’État construira massivement avec des pics de construction à 600 000 logements par an dans les années 1970. La politique gaullienne avec un État centralisateur va permettre la construction de logements pour des centaines des milliers de familles. Ce sont les grands ensembles avec leurs avantages (meilleur confort) et leurs désavantages (la Sarcellite).
En 1977, le plan Barre modifie radicalement la politique du logement. On passe d’une aide à la pierre, c’est-à-dire le financement direct par l’État de logements à une aide à la personne, c’est-à-dire la subvention à un ménage ou à une personne. C’est d’abord l’idée que tous les Français ont droit à la propriété. Ce corpus idéologique n’a jamais été remis en cause ni par les gouvernements socialistes ni par la droite depuis 30 ans.
Et les premières mesures d’aide fiscale à la construction ont été accordées par Paul Quilès, ministre socialiste. Au cours des décennies, elles se sont renforcées pour finir par la loi Scellier qui est le summum du non-sens économique. Une aide fiscale qui fait que les propriétaires bailleurs peuvent déduire à la hauteur de 300 000 €, 25 % de leur investissement de leur feuille d’impôt. C’est la possibilité pour une minorité d’acquérir un patrimoine payé en partie par l’État.

De la loi SRU (Solidarité et renouvellement urbain) à la loi DALO (Droit au logement opposable), l’État a essayé de contrecarrer une politique du logement qui allait dans le mur. C’est-à-dire une baisse de la construction de logements abordables pour les familles. Ces deux lois qui en soi sont plutôt bonnes (obligation pour les villes de construire 20 % de logements sociaux et obligation de loger les familles sans logement avec responsabilité de l’État) ne sont pas appliquées. D’une part, les communes riches refusent de construire du logement social et d’autre part il n’y a pas assez de logements pour répondre à la demande des familles en recours DALO. Trente ans de politique du logement uniquement consacré à l’opportunité fiscale et nous arrivons en 2011 à des prix stratosphériques dans les grands centres urbains.

Aujourd’hui, il manque 1 200 000 logements pour répondre à la demande des Français

Depuis 10 ans, l’augmentation du parc de HLM tourne entre 32 et 36 000 par an sur la France Métropolitaine. On comprend très bien qu’il y a un hic. Il y a des constructions, mais aussi des démolitions et des ventes (très minimes) qui conduisent à un accroissement du parc immobilier social d’environ 1 % par an, ce qui est largement inférieur à l’accroissement naturel de la population.
Sur la période 2005-2015, les professionnels estiment qu’il faut construire entre 390 et 440 000 logements par an pour assurer les besoins, en incluant les objectifs de la loi DALO, alors qu’il se construit en moyenne 320 000 logements par an, sauf pour les années 2005, 2006 et 2007 où l’on a dépassé les 420 000 logements par an.
Ainsi, mécaniquement, le déficit augmente tous les ans. Le nombre de nouveaux ménages est en moyenne de 290 à 310 000 par an sur la période 2005-2015, auquel il faut rajouter les décohabitations (divorces, séparations) qui accentuent encore la demande. Il faut savoir qu’en région parisienne, la moitié des couples se séparent. Or, en région parisienne où la situation est la plus tendue, il se construit entre 35 et 38 000 logements par an. On comprend donc les hausses continues du prix au m2 (en 2010 + 20 % à Paris, + 16 % en Ile-de-France).
Nous arrivons donc à un besoin supérieur à 500 000 logements par an. Le déficit annuel tourne autour de 200 000 depuis la fin des années 1990. Lorsque la Fondation Abbé Pierre cite le chiffre de 900 000, cela implique qu’il faudrait construire sur 5 ans près de 200 000 logements supplémentaires. Un logement construit, c’est 1,5 emploi (chiffre de la Fédération du bâtiment). On voit le gisement d’emplois non délocalisable.

L’aide personnalisée au logement (APL) et l’allocation logement

Destinée à aider les personnes à se loger, elle a été instituée en 1976 avec la réforme Barre qui mettait fin à l’aide à la pierre. Cette aide représente actuellement 16 milliards d’euros par an. Elle est versée à près de 6,5 millions de ménages. Aujourd’hui, sans cette aide, de nombreuses familles seraient dans l’incapacité de régler leur loyer.
Les APL ou AL sont versées par les CAF départementales selon les barèmes suivants.
Il faut gagner moins de 1,06 SMIC pour une personne seule, 1,95 SMIC pour une famille de 4 personnes ou 2,39 SMIC pour 5 personnes pour obtenir une APL.
Les APL ou AL ont eu un effet pervers : l’augmentation continue des loyers dans le privé. Le propriétaire profitant d’un versement d’APL pour augmenter le loyer. Ainsi, sur le parc conventionné donnant droit à l’APL, 50 % des loyers sont supérieurs au loyer plafond et sur le parc privé donnant droit à l’AL, 90,8 % des loyers sont supérieurs au plafond. Ce qui explique que les familles modestes consacrent souvent près de 40 % de leur revenu pour se loger dans le parc privé. Les APL sont versées à près de 60 % aux HLM.

Expulsions

En 2010, il y a eu près de 100 000 jugements d’expulsion et un peu plus de 11 000 mesures effectives. D’autre part, la trêve hivernale qui empêche les expulsions est d’un cynisme affligeant, comme si le soleil revenant, dormir dans la rue est agréable lorsque les températures augmentent.
La politique du logement d’urgence, c’est avant tout l’absence de politique du logement tout court. Il n’y a pas assez de logements, donc on loge dans les hôtels (très cher), les gymnases, etc., et le beau temps revenant, l’État ferme les lieux d’accueil. Pour donner l’exemple de l’Allemagne, il n’y a pas de gymnases pour accueillir les indigents, les collectivités sont responsables de leurs administrés et ont l’obligation de les loger. À cet effet, elles disposent d’un volant de logements pour répondre à la demande.

Le prêt à taux zéro

Cette mesure qui a été étendue à l’ensemble des familles, sans condition de ressources, permet aux familles les plus aisées d’acquérir des logements. Et c’est surtout les familles qui en pâtissent, 59 % des bénéficiaires sont des couples sans enfants ou célibataires. De plus 35,6 % des souscripteurs se trouvent dans les tranches de revenus les plus hautes et 13 % dans les plus basses. Il en coûte 2,6 milliards à l’État en année pleine.

PLAI, PLA, PLUS, PLS… Qu’est-ce que c’est ?

Ce sont des prêts accordés par la Caisse des Dépôts et Consignations aux opérateurs de logements sociaux.
• Les PLAI (Prêt locatif aidé d’insertion) s’adressent à 30 % des ménages les plus modestes. Le plafond de ressources pour bénéficier d’un logement PLAI est de 28 451 € à Paris, 26 172 € en Ile-de-France et 20 612 € pour les autees régions pour une familles de 4 personnes.
• Les PLA (Prêt locatif aidé) et les PLUS (Prêt locatif à usage social) sont destinés aux 64 % des ménages. Le plafond de ressources pour bénéficier d’un logement PLUS est de 51 726 € pour Paris, 47 585 € pour l’Ile-de-France et 37 272 € pour les autres régions pour une famille de 4 personnes.
• Les PLS (Prêt locatif social) constituent le dernier avatar de la politique de logement. Il faut savoir que 80 % des Français rentrent dans le cadre du PLS. Le plafond de ressouces pour bénéficier d’un logement PLS est de 67 243 € pour Paris, 61 861 pour l’Ile-de-France et 48 854 € pour les autres régions pour une famille de 4 personnes.
En 2010 sur les 120 000 logements sociaux financés, un tiers sont des PLS, tandis que les PLAI représentent 20 %. Pour 2010, il s’est construit 304 000 logements. Seuls 35 % sont dans le cadre des logements sociaux alors que 80 % de la population rentrent dans les critères d’attribution.

Pourquoi les Allemands ont des loyers inférieurs en moyenne de 50 % par rapport aux Français ?

Selon l’Association des agents immobiliers, la moyenne des loyers en Allemagne est de 5,12 € et la ville dont les loyers sont les plus chers est Munich, avec un loyer moyen de 9,70 €. Les grandes villes se situant autour de 7,20 €, Berlin fait exception avec un loyer inférieur à 6 € dans sa partie Est. De quoi faire pâlir les Parisiens qui ont des loyers entre 24 € et 54 €.
Les Allemands sont majoritairement locataires, à près de 60 %, et ne rencontrent pas de problèmes pour se loger ni de crise du logement causée par une hausse des prix comme en France.

L’Allemagne a construit massivement après la Seconde Guerre mondiale. Évidemment le parc avait été en grande partie détruit par les bombardements. Cette politique de construction, commencée en 1950, s’est effectuée sur 3 fondements :
1. Gel des loyers pour les logements construits avant 1949
2. Indexation des loyers dans les logements sociaux (le logement est considéré comme social à partir du moment où il reçoit une aide de la collectivité publique)
3. Soutien massif par des subventions atteignant 50 % du coût de construction

Cette politique a permis la construction en 5 ans de 2,5 millions de logements collectifs. De plus, l’encadrement des loyers et des droits des locataires (le bail est à durée indéterminée) a permis une modération des loyers sans que les investisseurs bailleurs n’abandonnent le secteur. La construction s’est faite majoritairement par des organismes publics appartenant aux Länder ou liés aux syndicats comme Neue Heimat.
À partir des années 1960, une libéralisation s’est peu à peu effectuée et aujourd’hui, les logements sociaux représentent moins de 20 % du total du parc. Depuis les années 1980, les communes ont commencé à vendre leur parcs comme Dresde par exemple qui a vendu 48 000 appartements à un fonds d’investissement américain ; sans que les loyers n’augmentent d’ailleurs.
C’est majoritairement le privé qui construit et qui passe un accord avec les Länder ou les communes avec un conventionnement qui peut aller de 7 ans à 60 ans en fonction de l’aide. Le logement n’est pas une marchandise comme une autre, et le gouvernement allemand, par sa politique de subvention et d’aide à la pierre, a développé un habitat collectif qui, d’une façon générale, est bien construit, avec des habitats collectifs sociaux d’une qualité qui n’est pas comparable à la France. Il n’y a pas eu de destruction de logements comme dans nos banlieues et chaque famille peut se loger à des prix très abordables. Le prix au m2 des logements sociaux varie dans une fourchette de 2,5 € et 4 € le m2.

Logements sociaux et Europe

A Amsterdam, il y a 60 % de logements sociaux, dont 90 % qui appartiennent à la commune. Quant à Stockholm, il y a 26 % de logements sociaux, dont 70 % sont à la commune. Enfin pour Berlin respectivement 20 % et 40 %.
Les pays du Nord ont eu une politique volontariste sur le logement, l’État et les communes ont toujours investi. Et ce n’est que dans les pays du Sud, plus pauvres, que les propriétaires sont largement majoritaires entre 80 % et 87 %. Ce sont aussi dans ces pays que les enfants restent le plus longtemps chez leurs parents, comme si pour prendre au mot Nicolas Sarkozy, la propriété permet d’assurer un patrimoine, certes, mais le patrimoine immobilier est le plus cher et de plus en plus hors de portée d’une grande partie de la population. De plus, l’exemple allemand, où la location est majoritaire, démontre que la propriété n’est pas forcément un objectif à partir du moment où les loyers sont à des prix très raisonables. La propriété c’est aussi un habitat dégradé comme en France et dans les pays du Sud. Une grande partie des familles n’a pas les moyens d’assurer l’entretien de son logement. En France, l’ANAH (Agence nationale pour l’amélioration de l’habitat) consacre une grosse partie de son budget aux détériorations des copropriétés et à partir de 2011 à l’efficience énergétique de l’habitat individuel, avec des occupants qui n’ont pas assez de revenus pour isoler leur maison et se chauffer en hiver.

L'Union des FAmilles Laïques est un mouvement familial qui défend la laïcité, une vision progressiste et non familialiste de la famille, la protection sociale et les services publics, le féminisme, l'école républicaine, le droit au logement et l'écologie

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