L’UFAL qui a milité activement pendant 15 ans en faveur d’une loi réglementant le port des signes religieux à l’école ne peut qu’approuver l’initiative du ministre Vincent Peillon de compléter la loi du 15 mars 2004 par une « Charte de la laïcité ». Présenter la laïcité comme une condition de la liberté, et non une suite d’interdictions, c’est exactement l’idée que nous ne cessons d’avancer, comme nous l’avons fait à l’occasion du 9 décembre 2012 avec notre campagne « la laïcité, c’est la liberté ».
Une Charte a-t-elle valeur contraignante ? Au cas présent, oui : inscrire son enfant dans une école publique c’est adhérer à ce texte, qui engage donc les élèves, mais aussi l’établissement et ses personnels. La Charte vaut comme un super-règlement intérieur de toute école publique.
Toutefois, si l’intention est bonne, sera-t-elle facile à concrétiser après un abandon total, depuis des décennies, de toute formation des enseignants à la laïcité ? L’UFAL est disposée à jouer son rôle, et qualifiée pour intervenir en la matière.
Le texte de la Charte n’appelle pas de critiques majeures : il commence par le rappel de l’article 1er de la Constitution, et mentionne clairement à plusieurs reprises les « bornes » fixées par la loi à l’expression religieuse : elle ne peut être invoquée pour se soustraire aux règles ni aux programmes scolaires.
On émettra une réserve sur le terme « valeurs de la République ». Le problème des valeurs est que nul ne les définit de la même façon. Un seul exemple : le « pluralisme des convictions », « valeur » invoquée par la Charte, l’est également par les partisans du port de tous les signes religieux à l’école ! Contentons-nous des « principes », objectifs et explicités par le droit (les textes et la jurisprudence), ce sera bien.
Autre imprécision, le concept de « culture » (« commune et partagée », point 7) reste totalement ambigu : signifie-t-il « ensemble de savoirs et de références académiques communs » (sens scolaire du terme) –auquel cas nul ne contestera la nécessité de son acquisition, ou bien « traditions symboliques particulières à un groupe humain » (sens anthropologique) –ce qui serait une redoutable invitation au relativisme des « valeurs », justement, et au fameux « multiculturalisme », ennemi de l’universalisme –donc de la laïcité ? Rappelons que la laïcité est un « cadre sans contenu » : ni « culture » ni courant de pensée particulier, elle les permet tous (sous réserve du respect de l’ordre public).
Enfin, on notera que le Défenseur des Droits vient de rappeler la question, selon lui non résolue, des accompagnateurs bénévoles (parents) de sorties scolaires : le port du voile peut-il leur être autorisé ? L’UFAL considère, comme l’a fait le tribunal administratif de Montreuil, que ces « collaborateurs occasionnels du service public » sont astreints aux mêmes règles de neutralité religieuse absolue que les agents publics. Mais les partisans du « multiculturalisme » et de la « laïcité ouverte (inclusive, positive, plurielle, apaisée, etc.) » continuent de s’agiter. Il est dommage que rien dans la Charte ne permette de régler le problème.

Militant laïque, professeur, puis haut-fonctionnaire, Charles Arambourou est actuellement magistrat financier honoraire. Il suit les questions de laïcité au bureau national de l’UFAL.

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