Ce sont : Rémy Schwartz, Caroline Fourest, Henri Pena Ruiz, Jean Glavany, Catherine Kintzler, tous contributeurs de l’ouvrage L’ABC de la laïcité. Telle est la révélation parue sur le site Contre-attaque(s), magazine en ligne qui se propose « d’en finir avec l’islamophobie ». Et si le nom de l’auteur de l’ouvrage, notre ami Eddy Khaldi, est soigneusement caché au lecteur (comme Trotsky effacé des photos retouchées sous Staline), c’est peut-être qu’il n’est pas assez islamophobe ?

Heureusement, le dénonciateur islamophile ne se contente pas de donner les noms : il nous administre aussi une leçon de laïcité. Et elle vaut le détour !

On comprend d’abord que la laïcité serait une « exception française », que « nous » sommes « prêts à offrir au monde, qui n’en a rien à faire », signe de « notre arrogance » : un peu de haine de soi nous met dans l’ambiance.

Nous apprenons ensuite que l’ABC commet une « confusion » entre laïcité et garantie de « l’égalité entre hommes et femmes ». Preuve imparable : celle-ci n’est toujours pas réalisée alors que la France se dit constitutionnellement laïque. Puisque il en va de même (hélas) de la liberté, de l’égalité et de la fraternité, devrons-nous aussi éviter de « confondre » ces principes avec la devise de la République ? Et Contre-attaque(s) dévoile la supercherie : « l’égalité homme-femme (…) ne mobilise ces auteurs que quand il s’agit de parler des femmes musulmanes ». D’ailleurs on trouve sur ce même site un intéressant article qui justifie les prêcheurs salafistes du « salon de la femme musulmane » de Pontoise, odieusement perturbé par les Femens le 13 septembre dernier.

Toujours à propos de l’ABC de la laïcité, le Conseiller d’Etat Rémy Schwartz est particulièrement épinglé pour avoir affirmé que les programmes d’enseignement « ne peuvent être remis en cause au nom des convictions personnelles ». Faut-il être islamophobe, en effet, pour oser rappeler la différence entre savoir et croire ! Ne vaudrait-il pas mieux enseigner conjointement en sciences de la vie (comme dans certains Etas américains) l’évolution et le créationnisme ?

Au passage, Contre-attaque(s) nous garantit que « l’enseignement privé », parce qu’il est un « système de classe » (quoi, vraiment ?), « n’est pas, pour l’essentiel, un instrument de l’Eglise catholique ». Légère approximation, vu les 99% d’établissements privés catholique : mais la lutte contre l’islamophobie vaut bien une messe…

Bon, dira-t-on, mais finalement, le véritable « esprit de la loi », c’est quoi ? Alors là, accrochez-vous, chers lecteurs. Je n’invente rien. A part la lettre de Jules Ferry aux instituteurs du 17 novembre 1883 (« la morale du père de famille »…), « l’esprit de la loi », celui de « Jean Jaurès et d’Aristide Briand », selon Contre-attaque(s), c’est :

  • « le Conseil d’Etat qui confirme, après 1905, le droit des processions religieuses dans les rues des villes françaises, dans l’espace public ». Euh… ce droit est explicitement prévu par… la loi de 1905 (art. 27) – et a été précisément bafoué par les « prières de rue » non déclarées. Bah, juste une petite approximation de notre professeur de droit de la laïcité…
  • « les plus hautes instances de l’Etat qui, en 1926 inauguraient la grande Mosquée de Paris financée par l’Etat et la ville de Paris. » Cerise sur le gâteau ! L’esprit de la loi de 1905 serait donc la violation de son article 2 (« La République ne reconnaît, ne salarie, ni ne subventionne aucun culte »), dès lors qu’elle est commise au profit du culte musulman !

En réalité, la construction de la Grande Mosquée de Paris sur fonds publics, « en hommage aux 70 000 morts musulmans » de la Grande Guerre (Hervé Morin, ministre de la guerre, en 2010 : mais comment diable a-t-il dénombré les croyants ?), c’est le symbole, non de l’esprit de la loi de 1905, mais bien du colonialisme, pour qui, croyant ou pas, tout Algérien (par exemple) était réputé « musulman » jusqu’en 1962. Les pourfendeurs de « l’islamophobie » font le même amalgame (post) colonial entre adeptes d’une religion et victimes du racisme. Mais on ne peut à la fois donner des leçons de laïcité et apprendre son histoire…

Pour le plaisir, n’hésitons pas à dénoncer les autres islamophobes de l’ABC de la laïcité, injustement oubliés par Contre-vérité(s) : Marie-Françoise Bechtel, Frédérique De La Morena, Gérard Delfau, Daniel Foulon, Sihem Habchi, Patrick Kessel,  Patrick Roumagnac, Jean Paul Scot, Alain Seksig, Philippe Tournier.

Militant laïque, professeur, puis haut-fonctionnaire, Charles Arambourou est actuellement magistrat financier honoraire. Il suit les questions de laïcité au bureau national de l’UFAL.

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