Le NPA a choisi qu’une de ses candidates aux élections régionales s’affiche avec un voile islamique.

Or le principe constitutionnel de laïcité, selon l’interprétation unanime de toutes les juridictions, tant internes (Conseil d’État, Conseil Constitutionnel), qu’internationales (Cour Européenne des Droits de l’Homme), impose à l’État et aux Pouvoirs publics (la « sphère de l’autorité publique ») une obligation de neutralité religieuse absolue et d’égalité de traitement entre les citoyens.

Aucun élu de la République ne peut donc arborer un signe religieux (nonobstant les précédents de l’Abbé Pierre ou du Chanoine Kir, paix à leurs respectables âmes, qui siégaient au Parlement en soutane, voire de Christine Boutin brandissant la Bible…).

Un candidat le peut-il ? Il ne semble pas que la jurisprudence ait tranché là-dessus. Néanmoins, en devenant « candidat » à une élection, un citoyen quitte personnellement l’espace de la société civile pour entrer dans la sphère de l’autorité publique. C’est ainsi qu’il a à rendre compte des dépenses exposées pour sa campagne, et qu’il touchera des fonds publics s’il recueille un certain pourcentage de voix. Le mot vient d’ailleurs du latin « candidatus », « revêtu de la toge blanche » que portaient les impétrants aux plus hautes magistratures de Rome : signe de neutralité, déjà.

Quant aux électeurs, ils relèvent de l’espace de la société civile ; sous réserve de prouver leur identité, ils peuvent librement arborer des signes religieux en allant voter.

En revanche, une candidate renonçant à l’obligation de neutralité religieuse ne devrait pas être admise à se présenter aux suffrages du peuple, qui est indivisible : la République s’aveugle sur l’appartenance religieuse des citoyens. Voilà sans doute une nouvelle tentative de faire prévaloir « la diversité », si redoutablement opposée à l’égalité républicaine : mais le Conseil Constitutionnel (à propos du prétendu « peuple Corse »), a rappelé qu’aucune « fraction du peuple » ne peut réclamer sa reconnaissance comme corps électoral.

Au-delà de l’analyse juridique (qui pourrait justifier un recours fondé -par voie de référé-  contre l’enregistrement officiel de la liste concernée), une évidence politique s’impose : il s’agit d’un appel du pied démagogique à une communauté religieuse. Il est d’ailleurs douteux qu’il soit efficace : les croyants sincères, de quelque culte que ce soit, tolèrent rarement qu’on instrumentalise leur religion. Seuls les intégristes peuvent s’y reconnaître, exactement comme pour la « France chrétienne » !

On nous dit enfin que la candidate en question serait « laïque et féministe ». Qui pourrait raisonnablement le croire ? Son voile politicien véhicule exactement le message opposé : c’est une insulte directe à toutes les femmes qui luttent contre les oppressions patriarcales et religieuses dont elles sont victimes, et à toutes les forces œuvrant pour le progrès.

Militant laïque, professeur, puis haut-fonctionnaire, Charles Arambourou est actuellement magistrat financier honoraire. Il suit les questions de laïcité au bureau national de l’UFAL.

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