Pendant longtemps, la lapidation me faisait tellement horreur et m’effrayait au point que je n’osais m’arrêter pour savoir qui était lapidé, et pourquoi.
De loin je soutenais des actions contre la lapidation, je signais des pétitions, sans vouloir comprendre son mécanisme de près.

Ce fut en 2008 et avec la lapidation d’Esha, une enfant somalienne, que j’ai compris que cette chose était encore plus abominable que je ne pouvais l’imaginer !
Esha m’habitera pour toujours. Pour elle et pour toutes les petites filles qui risquent être lapidées, il faut exiger l’abolition de cet acte.
Alors j’ai commencé à confronter de près la réalité de la lapidation. Au musée du Louvre deux œuvres, dont une de Nicolas Poussin inspirée de la Bible, mettent en scène cette barbarie.
Les deux tableaux montrent une jeune femme à terre et des hommes jetant des pierres sur elle. L’une gît par terre, seule, brisée, accroupie et déshumanisée, les hommes sont debout en meute déchaînée, assaillants.

Qui vise la lapidation ? Et pourquoi ?
Depuis les années 80, le nombre des pays musulmans qui calquent leurs lois sur le modèle de l’Arabie Saoudite et s’empressent d’appliquer la charia dans leur code pénal est en augmentation.
Il ne faut pas chercher longtemps pour s’apercevoir que la lapidation concerne à 99 % les femmes. Dans ces pays majoritairement misogynes, les hommes s’appuient sur des lois religieuses archaïques afin de contrôler les femmes.
Comme toujours, la première chose que font les intégristes en prenant le pouvoir dans un pays, c’est d’aller chercher une femme pour la punir et la lapider ! dit Ali Erishe.1

Souvenons en 2003, d’Amina, Nigerienne, accusée d’adultère et condamnée à cette mort atroce parce qu’elle avait osé d’avoir un enfant hors du mariage !2
Souvenons en 2004 de Muktar, 18 ans, condamnée par la justice tribale du Pakistan à un viol collectif, uniquement parce que son frère de 12 ans avait été vu en compagnie d’une jeune fille qui appartenait à une caste plus élevée. Dans ce même pays les femmes voulant des relations amoureuses choisies subissent les pires des châtiments !
Souvenons, en 2007 de Doa, Irakienne lapidée par des centaines d’hommes, dont ses frères. Elle était étudiante en art et accusée d’être amoureuse.

Puis en 2008, la petite Somalienne, Esha, 13 ans, accusée d’adultère, après avoir subie un triple viol. Elle avait osé porter plainte contre ses violeurs, la justice islamiste l’avait condamnée à mort par lapidation !3

Cette pratique gagne du terrain en Somalie, au Nigeria dans les Etats du Nord, au Soudan, en Afghanistan, au Yémen, aux Emirats Arabes Unis, voire au Kurdistan irakien dans des populations non-musulmanes où dans la communauté Yézidi, une jeune fille a été lapidée récemment à la demande de son oncle car elle était coupable d’aimer un musulman !
Et aujourd’hui avec Sakineh, les cris de toutes ces femmes et fillettes lapidées arrivent aux oreilles du monde ! Tant que cette barbarie n’arrête pas, les cris des ces femmes doivent sortir de nos gorges et envahir le sommeil de leur assassins !

La lapidation est la forme ultime de contrôle de la société sur la sexualité féminine et la liberté individuelle ! Elle commence à partir du moment où la société voile les femmes ! Et finit lorsqu’elle les massacre par des pierres.
Mais combien de temps faudra-t-il pour que ces crimes soient extirpés des codes et des mœurs, non seulement en Iran, mais dans tous les pays où les hommes osent la pratiquer.
Et que pouvons-nous faire d’autre que vomir lorsque plus près de chez nous, et il y a juste quelques jours, le directeur du centre islamique de Genève, le célèbre Hani Ramadan (frère de Tariq), à priori irrité par la mobilisation contre la peine de mort et surtout contre la lapidation de Sakineh déclare : « la condamnation à la lapidation a un but dissuasif…» Ouf ! Et Tariq Ramadan n’a pas dénoncé cette position de son cher frère.

Le mécanisme ?
La femme ou l’homme adultères, c’est à dire coupables de relations sexuelles hors mariages, ce qui peut même être le cas d’un viol pour les femmes, sont revêtus d’un linceul et enterrés dans un trou rempli de terre, l’homme jusqu’à la taille avec les bras dégagés, la femme jusqu’au-dessus des seins les bras attachés, et ils sont ensuite lapidés !
La femme ne pourra objectivement pas s’échapper, des hommes se sont parfois échappés gagnant ainsi la liberté.
Ensuite ils se précipitent pour jeter des pierres, car ce sont pratiquement toujours des hommes qui jettent des pierres. Pas de trop grosses pierres. Car il ne faut pas tuer trop vite ! Il faut faire durer l’agonie, le supplice !

Et le supplice dure aussi longtemps que s’entendent les râles de la condamnée à mort. Les hommes retirent alors un linceul rougi qui contient une bouillie humaine faite de sang, de chairs, d’os et de matière cérébrale.

En Iran, depuis les années 2000, des féministes sont à l’origines d’une campagne contre la lapidation. Et récemment en Afghanistan des femmes ont lancé la campagne de « 50% »4. Elles organisent des manifestations, recueillent des pétitions, et demandent aux femmes d’écrire des lettre au président Karzaï, pour en finir avec la lapidation, cette pratique et cette idéologie. On lit sur leur pancarte « la loi oui, la régression non ! ».

Cet acte barbare, venu depuis le fond de l’obscurité lointaine de l’histoire des hommes, pratiquée en tant que tradition, religion, ou légalisation ne vise que les femmes.
Il faut continuer à croire que les pressions peuvent aboutir à des lois internationales qui punissent les pays ou les individus qui pratiquent cette barbarie patriaco-phallocentrique ! Luttons pour son abolition !
La peine de mort quelle que soit sa forme doit être abolie !

Septembre 2010

  1. Néerlandaise d’origine somalienne et obligée de quitté l’Europe pour les USA, car l’on ne peut assurer sa sécurité ! []
  2. L’association Femmes Solidaires avait mené une importante action de soutien à cette époque. []
  3. Les cinquante hommes qui l’ont lapidée l’avaient déterrée trois fois pour s’assurer d’avoir enfin réussi à l’assassiner. []
  4. Pour dire que 50 % des votants sont des femmes ! []

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