Nous publions, ci-dessous, une réaction, parmi d’autres, d’un lecteur à notre communiqué « Parents accompagnateurs de sorties scolaires : vers des accommodements raisonnables avec la laïcité ? » publié le 24 décembre dernier et la réponse de Charles Arambourou, responsable de la commission Laïcité de l’UFAL.

Courrier de lecteur :

Je suis d’accord pour défendre un système scolaire laïc en France, y compris en Alsace, mais alors s’acharner sur les parents d’élèves et leur liberté de conscience, s’acharner sur les mères qui veulent participer aux sorties scolaires uniquement parce que leur religion ne vous plait pas, au mépris de la scolarité des enfants !!! Au mépris de leur image de soi, de leur investissement à l’école ! Cela dépasse largement les bornes du supportable.

Votre intolérance se trompe de siècle, et la seule chose que vous pouvez proposer c’est la guerre civile, mais certainement pas une société moderne pluri-ethnique et pluri-culturelle.
Vous faites à mon avis une très grave erreur, qui entache toutes vos prises de position par ailleurs.

M.C., enseignante, Montreuil
(athée qui se bat non pas pour l’imposition de l’athéisme, mais pour la liberté de conscience)

Réponse de Charles Arambourou :

Permettez-moi de vous faire observer que le communiqué d’UFAL-Flash que vous dénoncez, que plusieurs associations laïques ont co-signé, n’est en rien dirigé contre la liberté de conscience, bien au contraire, puisque la neutralité religieuse absolue imposée à l’école publique a précisément pour but d’assurer cette liberté de conscience, en évitant les pressions religieuses (mais aussi politiques, voire commerciales) sur les élèves, qui sont « des libertés en voie de constitution ». La liberté de conscience, ce n’est pas la seule liberté religieuse, comme vous avez l’air de le croire : c’est celle de croire ou de ne pas croire, ou d’être indifférent en la matière.

Nous souhaitons donc que les accompagnateurs, adultes participant occasionnellement au service public, respectent cette neutralité (ce que le Conseil d’État admet, par voie de « recommandation »). L’école doit rester un lieu d’instruction protégé de toutes les ingérences extérieures qui ne visent pas à ce but, y compris quand elles viennent des familles.

Je vous rappelle par ailleurs, ce que nous ne contestons pas, que les parents d’élèves peuvent amener ou venir chercher leurs enfants à l’école, participer à des fêtes scolaires, etc., en arborant des signes religieux s’ils le souhaitent.

« L’acharnement » vient en fait de certains comportements prosélytes qui prétendent imposer leur propre affichage religieux là où tous les autres se font aujourd’hui discrets — étant rappelé que les incroyants, eux, n’ont rien à afficher : quelle discrimination ! Une personne qui refuse d’ôter ses signes religieux pour accompagner une sortie scolaire traitera-t-elle de façon strictement égale les enfants, selon leur religion ou leur origine supposée au cours de cet encadrement (par exemple : vérification des interdits alimentaires pour le pique-nique, etc.) ? On a toutes les raisons d’en douter.

Au contraire, « l’investissement dans l’école » suppose que l’on adopte les règles de neutralité qui doivent y régner, par respect pour la liberté de conscience d’autrui. Quant à « l’image de soi », il faut une grande intolérance pour penser qu’elle serait mise à mal si l’on retirait un signe religieux pour encadre une sortie scolaire, quitte à le remettre après : ce type de comportement intransigeant, qui conduit les personnes à se stigmatiser elles-mêmes, est gravement préjudiciable à l’intégration républicaine, qui doit rester l’objet du travail de l’école publique avec les familles. Il ne doit surtout pas être encouragé.

La société est, certes, « multiethnique et multiculturelle », et j’ajouterai : métissée. Mais la République est indivisible, et laïque : avec ses services publics (dont l’école), elle a choisi une fois pour toutes d’ignorer volontairement l’origine ethnique, la couleur de peau, la religion, de ceux qui vivent sur notre sol pour leur accorder des droits strictement égaux à tous les autres. Nos institutions ne sont pas « multi-culturelles », mais universalistes : si vous êtes enseignante, vous devez le savoir mieux que personne. Former des citoyens, ce à quoi contribue l’école, est autre chose que répercuter passivement les pressions et les modes de vie (communautaristes ou autres) du quartier : nul ne prétend que ce soit facile, mais ce ne l’était pas davantage dans la France rurale arriérée du XIXe siècle ! Là est toute la beauté du métier : savoir résister à la société pour mieux faire avancer la République.

Rassurez-vous, aucune religion ne nous « déplaît » plus que les autres, la laïcité n’est en aucun cas l’athéisme. En revanche, ce qui « nous plaît », ce sont les familles, croyantes ou non, qui font le choix de valeurs républicaines de liberté, d’égalité, et de fraternité, et pour lesquelles le cadre de la laïcité de l’école est un atout précieux, mais toujours menacé (et pas essentiellement par le voile !), qu’il ne faut surtout pas laisser remettre en cause par des comportements prosélytes.

L'Union des FAmilles Laïques est un mouvement familial qui défend la laïcité, une vision progressiste et non familialiste de la famille, la protection sociale et les services publics, le féminisme, l'école républicaine, le droit au logement et l'écologie

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