Non, ceci n’est pas un canular anticlérical ! Dans un communiqué du 23 mars 2020, le conseil scientifique COVID-19 instauré par le Président de la République pour « éclairer la décision publique » considère « le soin pastoral » comme « essentiel dans toute réponse à une crise épidémique ». Il recommande donc la « création d’une permanence téléphonique nationale d’accompagnement spirituel inter-cultes ».
Vous avez dit « scientifique » ?
Est-ce bien rationnel ? Il est vrai qu’en ces temps de confinement, on ne peut rouvrir le sanctuaire de Lourdes, et les processions de flagellants ne sont plus autorisées, pas plus que l’imposition des mains par les exorcistes de la « médecine islamique », ou l’enduction de salive des marabouts. On se gaussera à loisir qu’un comité supposé « scientifique » se mêle des croyances, forcément toutes particulières, d’une population qu’il s’agit de protéger ou de soigner dans son ensemble. Tout cela sent son Moyen Âge. Le président du comité, le professeur Delfraissy, est immunologiste : il y a du souci à se faire s’il mélange croyances particulières et universalité de la science ! Mais le plus grave n’est même pas là.
Toute instance de la République doit être laïque
Dans un pays dont 60 % des habitants environ se disent incroyants, ou détachés de leur religion d’origine, une instance officielle peut-elle, en temps d’épidémie, ne se préoccuper que des 40 % restants ? C’est déjà contraire à toute règle prophylactique… « Ils n’en mouraient pas tous, mais tous étaient frappés » (La Fontaine) : « celui qui croyait au ciel et celui qui n’y croyait pas » (Aragon). Un conseil institué officiellement par le Président d’une République laïque auprès d’un ministre se doit de respecter absolument la liberté de conscience, et de ne reconnaître aucun culte — principes constitutionnels. Le bricolage « inter-cultes », c’est le cléricalisme, qui prétend soigner avec la « clériquine » — autrement dangereuse que la chloroquine chère au professeur Raoult !
Six religions n’ont pas le monopole des convictions spirituelles ou humanistes
Pire, le conseil « scientifique » limite sa préconisation aux « représentants des principaux cultes ». Le terme de « représentant » des cultes est déjà insupportable dans une République laïque, qui ne connaît que leurs « responsables ». Mais surtout, qui donc sont ces « principaux cultes » ? M. Macron s’est adressé par visioconférence le même 23 mars à six d’entre eux : catholique, protestant, orthodoxe, israélite, musulman, bouddhiste. Tant pis pour les autres (hindouistes, pastafaristes, taoïstes, chevaliers Jedi…) Au moins le Président avait-il convoqué (fausse symétrie sans doute) quelques associations non confessionnelles : Obédiences maçonniques, Fédération nationale de la Libre-Pensée, Comité Laïcité République1. Or ces « autorités morales » non religieuses sont par définition exclues du soin « pastoral » prêché par le comité scientifique…
Certes, nul ne nie l’importance des facteurs moraux et psychologiques dans la lutte contre une épidémie. Il appartient à tout culte, comme à toute association non confessionnelle, de s’organiser pour soutenir ses ressortissants. Mais au nom de quoi les responsables de quelques cultes monothéistes seraient-ils plus fondés que n’importe quelle autre association convictionnelle, philosophique ou humanitaire, à apporter ce soutien moral ? Et au nom de quoi se permettraient-ils de le faire à d’autres que leurs adeptes ? Les religions, comme toute autre conviction, sont affaires privées. Elles ne sont pas « d’intérêt général ». Un « conseil scientifique » de la République n’a en aucun cas à leur reconnaître le monopole de la vie morale et spirituelle.
- On veut bien que les Obédiences maçonniques soient des « autorités morales », si elles se réclament de « l’étude de la morale ». Mais que venaient faire la FNLP et le CLR dans cette galère ? La FNLP a décliné.[↩]
9 commentaires
Le Conseil scientifique recommande aux pouvoirs publics de soutenir l’initiative de certains des représentants des communautés religieuses de création d’une permanence téléphonique nationale d’accompagnement spirituel. Voici son texte exact qui figure dans une Annexe de, son avis du 23 mars 2020 sur les « Points d’alerte » que le CS signale au gouvernement : »7. Accompagnement spirituel
En termes de santé publique, le « soin pastoral » est également essentiel dans toute réponse à une crise épidémique. Le Conseil scientifique recommande de soutenir l’initiative des principaux représentants des communautés religieuses pour la création d’une permanence téléphonique nationale. Cette permanence prendrait la forme d’accompagnement spirituel et bénéficierait d’écoutants sélectionnés, proposés et pris en charge par chacun des cultes, qui sont disposés à les mettre à disposition dans les plus brefs délais. Les écoutants, qui répondront dans une démarche inter-cultes, pourront orienter ceux qui le souhaitent vers des personnes désignées par chaque culte pour répondre à leurs besoins spécifiques.Le Conseil scientifique souhaite attirer l’attention sur la nécessité d’accompagner les initiatives actuelles notamment de création d’une permanence téléphonique nationale d’accompagnement spirituel inter-cultes. »Il est extrêmement étonnant que le CS, qui a dû faire l’objet d’un lobbying intense, se fourvoie dans cette direction dont il n’a pas à s’occuper surtout pour donner aux pouvoirs publics des recommandations contraires aux lois de la République et à leurs principes fondamentaux dont le principe de non reconnaissance des cultes a valeur constitutionnelle depuis une décision du Conseil constitutionnel de février 2013. Si certains cultes veulent créer une permanence téléphonique nationale qu’ils le fassent, ni le CS, ni les pouvoirs publics n’ont à s’en mêler.
Bref, c’est aux pouvoirs publics que l’UFAL devrait notifier l’inanité de ce point de l’avis du CS en leur demandant de ne lui donner aucune suite ! Une motion commune de toutes les associations laïques adressée au Président de la République, vite !!!!
Pierre Ouzoulias, sénateur des Hauts-de-Seine
Validation d’une questionLa question écrite que vous avez déposée a été validée par la division des questions. Préconisation du conseil scientifique pour l’organisation d’un « soin pastoral »
À publier le : 02/04/2020
Pingback: « soin pastoral du COVID19 | Observatoire de la Laïcité de Provence - OLPA
oui, grand retour au moyen âge, avec la taxation du travail et de la consommation(la taille et la gabelle), avec l’obscurantisme découlant de l’interdiction d’enseigner la méthode , dès 1969,
remplacée par l’apprentissage par imitation , digne des écoles coraniques, la méthode globale etc,…
et forcément le retour en force des croyances pour combler l’extraordinaire incapacité à comprendre de la population votante.
Très bienMais pourquoi ne pas avoir posé une question orale au titre des questions au gouvernement qui passe en séance publique ?
Voulez-vous accepter de voir le contexte dans lequel le Comité scientifique parle des religions? Certes, il aurait pu s’en dispenser mais son intervention n’est pas aussi unilatérale que laisse supposer la discussion engagée ici. Merci de voir l’article et le débat: https://www.hiram.be/la-peste-ou-la-renaissance/?
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Ahahah ! un coup de goupillon et comme par miracle le coronavirus peu amène disparait ! Mais attention, ne fonctionne pas pour le coranovirus…
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