Vite, Monsieur le Président, des centres de déradicalisation des laïques ! Les militants de l’UFAL demandent à être fichés « L »
Un communiqué de l’AFP (repris par Le Figaro et l’Obs, notamment), nous apprend que « devant les représentants des six principales religions (catholique, protestante, orthodoxe, musulmane, juive et bouddhiste), Emmanuel Macron a souligné que “la République est laïque”, mais “non la société”. » « Il a parlé de “RADICALISATION DE LA LAÏCITÉ” », selon le grand rabbin de France, Haïm Korsia. »
Que la République soit laïque, et non la société, personne n’en doutera ici. Étant tout de même rappelé que la société est régie par des lois laïques, donc indépendantes de tout dogme religieux — à commencer par, l’état civil, l’école publique, le mariage, la procréation, les funérailles, etc. Même si beaucoup reste encore à faire…
Or justement, dans une « République laïque », on ne peut pas parler de « représentants des religions », pire, « des principales religions ». Voilà qui nous renvoie fâcheusement à la triste période du Concordat de Bonaparte (1801-1905). Pourquoi ?
- Il ne saurait y avoir de « représentants des religions », puisque « la République ne reconnaît aucun culte » (art. 2 de la loi de 1905). En revanche, il existe des responsables des cultes, qui en assurent l’exercice (art. 1 et 4 de la loi de 1905). Mais ils ne « représentent » que « l’exercice de leur culte », en aucune manière leur religion, encore moins leurs adeptes — sauf à considérer que la majorité des catholiques, par exemple, se sentent « représentés » par un Magistère pontifical qui interdit la contraception et l’IVG ! Qui dit « représentants » suppose des « cultes reconnus »… comme sous le Concordat et/ou en Alsace-Moselle.
- La notion de « principales religions » n’a dès lors aucune pertinence autre que sociologique : ou on les reçoit toutes (et l’Élysée n’y suffirait pas !), ou en n’en reçoit aucune — telle est la solution de la laïcité, qui est d’abord séparation. C’est le Concordat de 1801 qui reconnaissait le catholicisme comme « religion de la majorité des Français » : grâce à quoi, au bout d’un siècle, l’Église était devenue le plus dangereux adversaire politique de la République, qui a dû adopter la loi de 1905 !
Quant à la dénonciation d’une supposée « radicalisation de la laïcité », cela relève au mieux de la démagogie, histoire de caresser les cultes dans le sens du poil (osons, c’est fête !). Il y a quand même lieu de se préoccuper quand le Président d’une République laïque suggère qu’elle serait trop laïque !
Au pire, le chef de l’État croit à ce qu’il dit : et alors c’est carrément glaçant. Si la radicalisation est partout, elle n’est plus nulle part, et l’État n’a plus à la combattre là où elle se trouve. Or c’est la radicalisation politico-religieuse du terrorisme djihadiste qui a tué en France environ 250 personnes depuis 2012, sans compter les blessés graves.
En revanche, aucun mort, jamais, n’a été à déplorer du fait d’une prétendue « radicalisation de la laïcité ». Mais si le ridicule tuait, il y en aurait désormais un : Emmanuel Macron.
4 commentaires
Soyons vigilants. Ayant accompagné un ami à la messe de Noël j’ai pu entendre le curé dénoncer l’interdiction de placer des crèches dans l’espace public et appeler les présents à envoyer des textos à tous leurs amis pour leur souhaiter un joyeux Noël en précisant bien jour de la naissance du Christ.
On ne peut que partager l’avis de Charles Arambourou. C’est même indigne de traiter des républicains sincères de cette manière puisqu’il est évident que notre bon président ne pensait pas aux racistes et aux xénophobes en parlant de radicalisation de la laïcité mais à tous ceux qui sont attachés aux valeurs d’émancipation sans compromis avec les obscurantistes de tous poils…En outre, il est idiot d’opposer la République et la société civile d’une manière binaire autour de la laïcité, la première y étant soumise et la seconde en étant épargnée, car la réalité est plus complexe. On pensait qu’une pensée complexe comme la sienne aurait su percevoir davantage des nuances que comporte notre droit et notre système philosophico/politique.Encore raté…
En supposant qu’E.Macron ait bien dit ces deux expressions, on peut s’interroger sur sa maitrise de la novlangue (Lingua Quintae Respublicae). Les laïcs sont-ils devenus comme des terroristes qui mènent un combat contre les tenants d’un Grand Architecte et insufflant des idées toxiques envers un Bon Dieu ? Et il faudrait dans ce cas admettre d’affubler la laïcité d’une expression modératrice, par exemple "laïcité intelligente et moderne" que semble vouloir souhaiter notre président. Les laïcs deviennent alors des laïcards radicalisés (ils faut vite créer des centres de radicalisation pour lutter contre eux !), soutiens d’une laIcité bête et rétrograde. Pauvre de nous…
Sur ce même sujet nous partageons l’indignation de l’UFAL sur les propos présidentiels et l’avons écrit dans un article de fond publié notamment dans Marianne :https://www.marianne.net/debattons/forum/republique-societe-laicite-il-y-aurait-une-intruseet par le blog Mezetulle de C. Kintzler :http://www.mezetulle.fr/republique-societe-laicite-il-y-aurait-une-intruse/On ne peut qu’inviter les amis de l’UFAL et les abonnés à son blog à s’y reporter.